Liberté ? Egalité ? Fraternité ? Mon cul oui !
Je suis en colère, vraiment très en colère. Que cette devise soit encore gravée aux frontons de nos mairies me fait de plus en plus penser à une publicité mensongère.
J'ai vécu, ces derniers temps, une expérience révoltante.
Appelons le Monsieur L, ou Monsieur X, tiens, puisque qu'il s'agit un peu de ça.
M. X n'a plus de famille. Une fille, pas vue depuis vingt ans avec laquelle il n'a plus aucun contact et qui a demandé à ne surtout pas être prévenue au moment du décès de M.X, son géniteur. Je pense qu'une haine pareille, justifiée ou injustifiée là n'est pas le problème, mérite que l'on supprime du vocabulaire le mot père.
M. X, l'âge aidant, n'est plus en mesure de gérer ses sous ; un curateur est nommé par le Tribunal d'Instance. Il conserve la majeure partie de ses capacités cognitives et est tout à fait à même de voter. Donc, curateur, ça a son importance dans l'histoire.
M. X a la trèèèès mauvaise idée de revenir à la vie pour quelques heures après quelques secondes (minutes ?) d'arrêt cardiaque. Il aura donc le temps d'être transporté à l'hôpital public le plus proche par le SAMU et les pompiers. Ca aussi, ça a son importance.
M. X a la trèèèès mauvaise idée de mourir un mercredi, jour de rtt du curateur pour cause d'enfant à charge et où tu mets plus de six heures avant de joindre quelqu'un, de touche étoile en touche dièse. Ca n'a aucune importance, mais c'est proprement horripilant et insupportable ! Vive les gros services de tutelle !
M. X a aussi la trèèèès mauvaise idée de ne pas être bien riche. En même temps un hébergement en EHPAD croque les dernières économies que tu as pu constituer... à plus de 1500 euros par mois
M. X aussi eu la trèèèès mauvaise idée de n'avoir confié aucune de ses dernières volontés à personne en dehors de quelques voisins de table à qui il a dit qu'il souhaitait être incinéré, le jour où, et vivre ses derniers instants dans la petite structure où il aura passé ses dernières années, où y être ramené s'il n'y mourrait pas.
Et le jour où est arrivé, donc, un mercredi. Et il est donc mort à la grande ville.
Pour sortir un corps d'un hôpital, la loi prévoit un délai de 24 heures, pas une de plus, pas une de moins. La loi, prévoit aussi que seule la famille, ou le tuteur, peut signer la demande de transfert du corps. Quid lorsqu'il n'y a aucune famille et pas non plus de tuteur, mais seulement un curateur ? Ben on s'en fout, y'a que le mort qui a le droit de signer ; il restera donc dans la petite case réfrigérée de l'hôpital de la grande ville, sans la moindre humanité.
M. X souhaitait être incinéré. Or, M. X n'a pas assez de sous sur son compte pour honorer les frais d'incinération (de l'ordre de 430 euros je crois, hors cercueil et transport).
Que faire ?
L'enterrer et ne pas respecter ses dernières volontés ?
La Commune de la petite ville prendrait bien les frais d'inhumation à sa charge dans le caveau des indigents (il est vide ou presque) sauf que la dépouille de M. X ne peut changer de commune, et que le caveau des indigents sera celui de la grande ville puisque les textes disent que c'est LA ville où le décès s'est produit quel que soit le lieu de vie.
Donc, en résumé, M. X ne sera pas incinéré et sa dépouille ira rejoindre pendant cinq ans celle des copains indigents de la grande ville. Et dans cinq ans, ses restes iront se battre en duel dans l'ossuaire communal.
Je ne sais pas quelle a été la vie de cet Homme, et je ne veux pas le savoir. Mais c'était pas la peine, en 2003, que Raffarin nous fasse tout un foin avec ses personnes âgées, leur dignité, le respect que notre nation doit à nos aînés (oui, c'est le mot à la mode ; vieux, c'est comme aveugle ou sourd, ce sont des gros mots)... et les inhumations inhumaines qui doivent disparaître d'un Etat tel que le nôtre.
Ouais, je rigole jaune car sept ans après, on n'a pas avancé d'un pouce !!
Notre beau pays considérerait-il l'incinération comme réservée à une certaine catégorie de la population, celle qui a les moyens de se la payer ?
Je suis en colère, vraiment en colère !